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Lieu de l’événement Journée doctorale, Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord,
Argumentaire
Dans la continuité du colloque international Le terrain en arts vivants. Récits, méthodes, pratiques (MSH Bordeaux/Université Bordeaux Montaigne, octobre 2022), nous nous interrogerons sur les méthodes et outils épistémiques aux croisements des sciences humaines, des arts de la scène, de la philosophie et des études théâtrales.
Empruntée à l’anthropologie réflexive, cette approche réflexive a pour objectif de proposer l’analyse critique des moyens et conditions de production de savoir. Elle participe à la constitution d’épistémologies et à l’émergence d’outils méthodologiques tels que l’auto-analyse (Bourdieu, 2004) l’auto-ethnographie (Dubé, 2016) ou encore les savoirs situés (Haraway, 1988).
C’est dans cette optique que nous proposons pour cette journée d’études avec une épistémologie des approches transdisciplinaires et contemporaines. En effet, si la transdisciplinarité mène à interroger la méthodologie du/de la chercheur.e sur son terrain, elle remet alors en question sa posture (Laplantine, 1996 ; Goulet, 2011), (re)pense les méthodes d’immersion et de négociation, et réfléchit à l’objectivation des outils de restitution, par exemple à travers la recherche-création (Losco-Lena, Pluta 2015, Gosselin, Le Goguiec, 2006). Cette dernière est un processus de création qui fait partie intégrante de l’activité de recherche, qui contribue « au développement du champ concerné par un renouvellement des connaissances ou des pratiques, ou par des innovations de tous ordres » .
Le recours à la production de traces et d’archives peut également être envisagé, notamment à travers l’archive vivante ; elle incarne une praxis qui fait fonctionner les pratiques, les théories, les savoirs et les expériences (Bourcier, 2018), et fonctionne comme un support à la recherche et la production des savoirs, tout en participant à une mise en visibilité de pratiques sous-étudiées. C’est ce maillage de situations et de conditions qui s’épanouit dans ce que Braidotti appelle des « figurations ». Dans leur complexité, les artistes sont porteurs d’un renouveau esthétique poétique et existentiel : « A figuration is a living map, a transformative account of the self ; it’s not a metaphor. […] Figurations attempt to draw a cartography of the power relations […] they just express different socioeconomic and symbolic locations […] They are hybrid, contested, multilayered figurations that challenge dichotomous and dialectical oppositions between margins and center. (Braidotti 2011 : 10-12)
Dans une approche transdisciplinaire, il sera donc question d’analyser les approches immersives et les méthodes de restitution du/de la chercheur.e, sans négliger sa posture ni son investissement émotionnel et/ou corporel. (Jeantet, 2018 ; Broqua, 2009). La posture transdisciplinaire exige une assiduité réflexive dans la production d’apports épistémiques, doublement nécessaires dans le cadre de la profusion des champs scientifiques : quelles ouvertures et/ou limites épistémiques la transdisciplinarité peut-elle accorder aux méthodologies contemporaines ? Comment objectiver des méthodes de négociation et d’immersion sur un terrain artistique ? Quels apports et limites la pratique de la recherche-création peut-elle générer ? Comment se créent les traces et archives vivantes ? Qu’est-ce que les savoirs situés ont à nous apprendre ? Comment rendre visibles des pratiques jusqu’alors invisibilisées ? Comment s’expriment les figurations dans nos terrains d’études ?
Les propositions de communication doivent favoriser le dialogue transdisciplinaire, s’inscrire en sciences humaines et sociales, en arts de la scène (théâtre, musique, danse, cirque, performance, marionnettes et arts associés), et/ou philosophie. Cet appel à communication accorde une importance majeure aux représentations contemporaines de l’enquête de terrain ; les perspectives intersectionnelles sont donc particulièrement encouragées (Haraway, 1991 ; Borghi, 2013 ; Espineira, 2015).
Les communications (20 minutes environ) pourront s’inscrire dans les axes suivants :
- Épistémologie de l’ethnoscénologie et/ou de la transdisciplinarité en arts vivants et performatifs.
- Réflexivité méthodologique sur les approches de négociation sur le terrain et les outils de restitution.
- Pratiques artistiques et procédés de création du/de la chercheur.e
- Traces et archives vivantes, savoirs situés, figuration.
Modalités de contribution
La journée doctorale se tiendra à la Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord le 10 mai 2023.
Les propositions de communication, d’environ une page, seront accompagnées d’un titre, de cinq mots-clés et d’une brève notice biographique.
Les propositions sont à envoyer avant le 10 février 2023 aux adresses
- jade.cervetti@gmail.com
- violainedargent@yahoo.fr.
Elles seront évaluées par le comité d’organisation qui fera un retour le 25 février au plus tard. Une version augmentée de vos propositions (contenant la structure argumentative et la méthodologie) sera attendue pour le 20 avril 2023.
Comité d’organisation
Les doctorantes en ethnoscénologie (Université d’Artois, Textes et Cultures, UR 4028/ SOFETH) sous la direction de Nathalie Gauthard :
- Jade Cervetti, « Artivisme queer : performativité des corporéités transgressives. Une anthropologie du genre et de la performance ».
- Manuela Filomena Ottaviani, « Le corps joyeux. La pratique théâtrale comme terrain d’une éducation aux émotions. Les cas d’Odin Teatret (Eugenio Barba) et du WorkCenter de Pontedera (Richards-Grotowski) à la lumière de la philosophie de Spinoza.
- Selene D’Agostino, « Le transit festival de l’Odin Teatret ou la dramaturgie ; une parole subversive des femmes »
- Violaine Dargent, « Écho du monde dans un corps en jeu : pour une écologie du clown ».
Bibliographie indicative
ABÉLÈS Marc, « Le terrain et le sous-terrain », C. Ghasarian (dir.), De l’ethnographie à l’anthropologie réflexive. Nouveaux terrains, nouvelles pratiques, nouveaux enjeux, Paris, Armand Colin, 2002, p. 35-42.
BARBA Eugenio, Le Canoë de papier. Traité d’anthropologie théâtrale, Éditions L’Entretemps, coll. « Les Voies de l’acteur », 2004.
BORGHI, Rachele, « Post-porn », Rue Descartes (3), 2013, p.29-41.
BORGHI, Rachele, « De l’espace genré à l’espace ‘’queerisé’’. Quelques réflexions sur le concept de performance et sur son usage en géographie. Espace et Sociétés, (3), 2012, p.109-116.
BRAIDOTTI Rosi, Nomadic subjects : embodiment and sexual difference in contemporary feminist theory [2nd ed.], New York Chichester, Columbia University Press, 2011.
BROQUA, Christophe (2009). « L’ethnographie comme engagement : enquêter en terrain militant », Genèse, (2), 109-124.
BOURDEU, Esquisse pour une auto-analyse, Paris, Raisons d’agir, 2004.
CERVETTI Jade, « Pour une épistémologie ethnoscénologique du savoir queer », L’ethnographie, 5-6, 2021. URL : https://revues.mshparisnord.fr/ethnographie/index.php?id=1034
D’AGOSTINO Selene, « Le Magdalena Project », L’ethnographie, 5-6 | 2021, mis en ligne le 20 juillet 2021. URL : https://revues.mshparisnord.fr/ethnographie/index.php?id=960
DUBÉ Gabrielle « L’autoethnographie, une méthode de recherche inclusive », Présences Vol. 9, 2016, Rimouski, Université du Québec.
DUVIGNAUD Jean, Sociologie du théâtre, Paris, PUF, (1965), Rééd. Quadrige, 1999.
DUVIGNAUD Jean, KAZNADAR Chérif, GRUND Françoise, PRADIER Jean-Marie, « L’ethnoscénologie, manifeste », in Théâtre/public, Février 1995.
URL : http://skenos.mshparisnord.fr/items/show/51#?c=0&m=0&s=0&cv=0.
ELLIOT Denielle, CULHANE Dara (dir.), Réinventer l’ethnographie : pratiques imaginatives et méthodologies créatives (trad. par Genevière Deschamps), Laval, Presses de l’Université de Laval, 2021.
ESPINEIRA, Karine, « Pour une épistémologie trans et féministe : un exemple de production de savoirs situés. Comment s’en sortir ?, 1(2), 2015, p.42-58.
FAVRET-SAADA Jeanne, « Être affecté », Gradhiva, 8, 1990, p. 3-10.
FAVRET-SAADA Jeanne, Les Mots, la Mort, les Sorts. La sorcellerie dans le Bocage, Bibliothèque des Sciences Humaines, Paris, Galimmard, 1977.
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GAUTHARD Nathalie, Fêtes, mascarades, carnavals. Circulations, transformations et contemporanéité, (dir.), Éditions L’Entretemps, coll. « Les Anthropophages », 2014.
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GOULET, J. -G. A, « Présentation : l’interdit et l’inédit. Les frontières de l’ethnologie participante », Anthropologie et Sociétés, N° 35 (3), 2011, p. 9–42.
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LACASSE Serge, STEVANCE Sophie, Pour une éthique partagée de la recherche-création en milieu universitaire, Québec, Presses de l’Université de Laval, 2018.
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MARTIN Éléonore, Les dynamiques de la création contemporaine du Yuju à Taiwan : de la sauvegarde du patrimoine à l’expérimentation esthétique, (sous la direction de J-M Pradier,) Thèse de doctorat en Esthétiques, Sciences et Technologies des arts, Université Paris 8, soutenue le 18 novembre 2015.
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OLIVIER DE SARDAN Jean-Pierre, 2000. « Le « je » méthodologique. Implication et explicitation dans l’enquête de terrain », Revue française de sociologie, 41 (3), p. 417-445.
PLUTA Izabella, LOSCO-LENA Mireille, « Pour une topographie de la recherche-création », Ligeia, 2015/1 (N° 137-140), p. 39-46. DOI : 10.3917/lige.137.0039 SMASH. URL : https://www.cairn.info/revue-ligeia-2015-1-page-39.htm
PRADIER Jean-Marie, « Ethnoscénologie : les incarnations de l’imaginaire », in Degrés, Sémiologie du spectacle vivant 2, Bruxelles, 35eannée, n° 129-130, 2007.
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