- Du au
Lieu de l’événement ENSAD, Campus de Vanteaux, 19 Av. Martin Luther King , Limoges 87000 , France
L’Intelligence Artificielle, instrument de mutation de la pensée artistique ?
À l’ère du numérique, les technologies et les supports médiatiques se développent toujours plus, proposant un choix toujours plus considérable de possibilités. C’est dans ce contexte qu’une nouvelle forme d’intelligence issue de l’être humain fait son apparition : l’Intelligence Artificielle. Cette dernière, capable de recueillir, de développer des données et d’en tirer le choix le plus pertinent, vient à son tour menacer le processus de création, voire le rôle même de l’artiste.
L’art sans artiste
Ce concept, syntaxiquement et historiquement incohérent, selon lequel l’art pourrait voir le jour sans l’artiste, résonne désormais comme une possibilité. Certes, l’artiste reste la référence, le modèle originel, inhérent au processus de création de l’intelligence artificielle. Pour autant, la rapidité du programme numérique basé sur l’assimilation automatique offre à l’IA la possibilité de reprendre avec précision les codes artistiques des figures de proue des différents mouvements. Plusieurs siècles après leur mort, elle est capable de reproduire des œuvres de Cézanne, de Monet ou même de De Vinci en seulement quelques secondes, à partir d’un code détaillé. Que reste-t-il à l’artiste ? Qu’est-ce qui fait un artiste ? Une suite de 0 et de 1, formant un algorithme complexe, est-ce désormais cela un artiste ?
Le processus de création
Quels sont les questionnements artistiques et éthiques soulevés par ce processus de création informatisé ? Que ce soit de ce modèle ou de celui du processus humain, chacun s’imprègne et s’inspire de créations antérieures pour faire de l’art. L’humain puise dans son imaginaire, sa créativité, son vécu, ses émotions et bien d’autres facteurs psycho-sociaux pour induire un procédé de création. L’IA, a contrario, fonde sa création sur le calcul et la récupération de données représentatives du secteur de recherche. Avons-nous des raisons de nous inquiéter de son utilisation ? Et s’il devenait possible d’inculquer des valeurs humaines à une IA ?
L’anonymisation de l’art
L’art par tout le monde, pour tout le monde. L’art est pluridisciplinaire, nous ne saurions nous risquer à en définir les limites. Ses frontières sont poreuses parce que chaque artiste pioche ses idées chez d’autres, s’inspire et en inspire d’autres. Toute œuvre ne serait-elle qu’une réécriture, un palimpseste, toutes ne formant ensemble qu’un grand schème à conjuguer au pluriel ? Si l’art est un immense patchwork de créations, anonymise-t-il pour autant ses créateurs et créatrices ? La notion de plagiat est-elle toujours d’actualité à l’ère de l’interconnectivité ? Si une IA devient créatrice, la notion juridique de plagiat ne doit-elle pas être remise en question ?
L’art, un produit de grande consommation
La publication de livres est pour beaucoup de maisons d’édition une question plus économique qu’artistique. Le marché du livre est saturé d’offres et monopolisé par les « vaches à lait », les « poules aux œufs d’or ». Pourtant, les commerciaux n’hésitent pas à inventer de nouveaux procédés pour accroître encore leurs offres. Ainsi, la plateforme canadienne à la renommée désormais internationale, Wattpad, a fait le choix en 2019 de collaborer avec une IA, Story DNA. Cette dernière, grâce à une analyse poussée de la structure des phrases, de la grammaire ou encore de l’utilisation des mots, devait proposer les titres à publier sous format papier et dénicher les futurs best-sellers. Mais un best-seller est-il réellement identifiable avant son écriture et sa mise sur le marché ? Plus c’est consommable, plus c’est artistique ? Quelle place occupe l’art de nos jours ?
L’IA comme support aux artistes
L’IA possède des possibilités presque infinies d’utilisation. Bien que son exploitation fasse aujourd’hui de l’ombre aux artistes en chair et en os, elle peut aussi se montrer d’une grande aide pour ces derniers. En effet, la collaboration des artistes et des IA contribue à l’invention de nouvelles formes d’art en constante évolution. L’IA permet aux artistes de repousser les limites de leur créativité et de créer des œuvres d’arts uniques qui se connectent d’une nouvelle manière au monde. Attention néanmoins à ce que l’artiste ne devienne pas à son tour le support de l’IA, son travail n’existant qu’au travers de cette dernière. Comment se reposer sur l’intelligence artificielle tout en contrôlant son implication ? Est-il possible de poser des limites à ne pas franchir, afin que chacun garde sa place ? Où commence la dépossession du travail de l’artiste ?
Axes de réflexion proposés :
- Le processus de création à l’ère de l’IA
- L’art sans artiste
- L’anonymisation de l’art
- L’art, un produit de grande consommation
- L’IA comme support aux artistes, outil de création
Calendrier :
- Soumission des propositions : jusqu’au 28 janvier 2024 à 23h59
- Réponse du comité : 1er février 2024
- Journée d’étude : 14 mars 2024
Soumission :
Les propositions de communication (1500 signes environ) ainsi qu’une courte notice bibliographique (CV) sont à envoyer jusqu’au 28 janvier 2024 23h59 aux deux adresses suivantes : fabli.master2@gmail.com et odile.richard@unilim.fr
La journée d’étude se déroulera en français.
Comité Scientifique :
- François COADOU,
- Flavie FALAIS
- Yves LIÉBERT
- Thomas LUBERRIAGA
- Jacques MIGOZZI
- Isabelle PÉRÉ-FAM
- Eugénie PÉRON-DOUTÉ
- Odile RICHARD
- Nelly SANCHEZ
- Bertrand WESTPHAL
Bibliographie :
Laurence DEVILLERS (professeure en intelligence artificielle à Sorbonne-Université)
– Les Robots émotionnels. Et l’éthique dans tout ça ?, Paris, Éditions de l’Observatoire, 2020.
Jean-Gabriel GANASCIA (informaticien, philosophe et professeur à Sorbonne-Université)
– Le mythe de la singularité. Faut-il craindre l’intelligence artificielle ? Paris, Le Seuil, coll. « Science ouverte », 2017.
Luc JULIA (ingénieur et informaticien spécialiste de l’IA)
– L’intelligence artificielle n’existe pas, Paris, First, coll. « Documents », 2019.
François LARUELLE (professeur émérite de philosophie générale et contemporaine à l’Université de Paris-Ouest Nanterre)
-“La Philosophie devant l’Intelligence artificielle” dans Le Cahier du Collège international de philosophie, n°3 (mars 1987), p. 146-148.
Éric SADIN (écrivain et philosophe spécialiste du monde numérique)
–L’intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle. Anatomie d’un antihumanisme radical, Paris, L’Échappée, 2018.
Christiane PAUL (historienne de l’art, commissaire d’exposition spécialisée dans l’art numérique et professeure d’études médiatiques à New-York),
–L’art numérique, Paris, Thomas & Hudson, 2004.