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Lieu de l’événement Cergy Paris Université (CY Université),
Le rap est un genre réputé misogyne, qui met souvent à l’honneur des hommes performant une forme de masculinité hégémonique. Pourtant, de nombreux travaux universitaires se sont attelés à l’analyse de ces performances de genre, pour montrer principalement la façon dont les rappeuses se font une place dans ce milieu (Djavadzadeh, 2021 ; Ghio, 2020 ; Bertot, 2019, Bettina Ghio). D’autres ont aussi pu montrer que les masculinités du rap sont variées et largement construites par un discours extérieur et racialisant (Dalibert, 2018).
Cependant, depuis quelques années un certain nombre de rappeurs et rappeuses semblent sortir, dans un même mouvement, de la binarité de genre et d’un discours opposant féminisme et misogynie, pour se revendiquer du queer. Au Etats-Unis d’abord, avec par exemple Princess Nokia, Mikky Blanco, Big Freedia, Zebra Katz, Youg M.A., Tylor the creator, Lil Nas X ou Franck Ocean ; puis en France, avec entre autres Lalla Rami, Turtle white, Shany Da Flava, Illustre, Lala &ce ou Nyoko Bokbae.
Il s’agira d’étudier la façon dont ce rap, qui se revendique comme queer, invente de nouvelles formes, sur le plan visuel (clip), musical, textuel ; on pourra par exemple étudier la façon dont les clips de ces artistes font de la performance de genre un espace ludique et coloré d’expression de soi ; étudier la place qu’occupe, ou pas, la dénonciation des discriminations de genre : on pourra à ce sujet montrer que certain.es conservent un discours de dénonciation explicite (Illustre, « Type Chelou »), quand d’autres font du clip un espace non conflictuel dans lequel l’expression de soi se fait librement ; on pourra s’attacher à analyser une possible correspondance entre la performance de la non-binarité des artistes, dans les clip, et leur musique : Lala &ce et Nyoko Bokbae font ainsi le choix du « cloud rap », sous-catégorie du rap caractérisé par un tempo assez lent et une instrumentation aérienne, ainsi que des paroles volontiers absurdes ou décousues. Se jouerait alors une esthétique ambiguë et ludique, loin du militantisme féministe et explicite d’autres rappeuses (Chilla, Sale chienne ; Meryl et Rachelle Allison Ma Petite).
On pourra aussi interroger la façon dont ces artistes cherchent à se situer dans la société (Hammou, 2012 : 221), en étudiant par exemple les pochettes d’album, les interviews, ou les autres formes d’expression publique, pour voir si on peut repérer des tendances spécifiques à ce rap queer. Existe-t-il entre elles et eux des stratégies de soutien, par exemple par le biais du featuring, dont Karim Hammou a montré qu’il fonctionne dans le rap comme un réseau de légitimation par les pairs ? Tentent-ils et elles de se démarquer d’une génération précédente ? Cherchent-ils et elles à être associé.es les un.es aux autres ? Mettent-ils et elles en avant leur identité de genre et revendiquent-ils et elles de faire un rap queer ?
Un titre et un résumé d’environ 150 mots en français, accompagnés d’une brève notice bio-bibliographique devront être envoyés avant le 15 novembre 2022 aux adresses suivantes : sylvie.brodziak@cyu.fr et marion.coste@cyu.fr. Les personnes dont les propositions auront été retenues seront informées en décembre 2022.
Bibliographie indicative
Bertot, Sylvain, Ladies first, Une anthologie du rap féminin en 100 albums, Marseille, Le Mot et le reste, 2019.
Bouton, Eloïse, Madame Rap, Homepage – Le premier média dédié aux femmes et aux LGBT+ dans le hip hop (madamerap.com).
Carinos, Emmanuelle, Hammou, Karim (éd.), Perspectives esthétiques sur les musiques hip-hop, Aix-en-Provence, Presses Universitaires de Provence, 2020.
Dalibert, Marion, « Les masculinités ethnoracialisées des rappeur.euse.s dans la presse », dans Marion Carrel, Julienne Flori, Irène Jami, Patricia Osganian, Patrick Simon, Anna Zielinska (dir.) , dossier « La battle du rap : genre, classe, race », revue Mouvements n° 96, La Découverte, 2018.
Djavadzadeh, Keivan, Hot, Cool & Vicious. Genre, race et sexualité dans le rap états-unien, Paris, Amsterdam éditions, coll. « Les Prairies ordinaires », 2021.
Djavadzadeh, Keivan, « The motherfucking bitch era : la transition hardcore du rap féminin », dans Marion Carrel, Julienne Flori, Irène Jami, Patricia Osganian, Patrick Simon, Anna Zielinska (dir.) , dossier « La battle du rap : genre, classe, race », revue Mouvements n° 96, La Découverte, 2018.
Hammou, Karim, Une histoire du rap en France, Paris, La Découverte, 2012.
Hammou, Karim, Sonnette, Marie, 40 ans de musique hip hop en France, Paris, Presses de Science Po, 2022.
[Rediffusion] Table ronde : féminités et masculinités dans le rap et le hip hop.
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