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Event place Colloque international, Université Paul-Valéry, Montpellier 3, Montpellier 34, France
Quelle que soit sa nature, son étendue ou ses fonctions, le pouvoir se manifeste à travers les mots. Il les forge et les manie à sa guise pour asseoir sa légitimité et l’affermir auprès des destinataires selon une relation de subalternité. Il les utilise pour consolider ses positions et étendre son influence suivant une stratégie visant à provoquer et à pérenniser un rapport de domination / soumission. C’est grâce aux mécanismes du discours (P. Charaudeau : 2013) que le pouvoir agit sur les populations, les persuade, les dissuade et oriente la marche de l’histoire.
La notion de « pouvoir » est ici entendue dans ses acceptions les plus larges : politique, économique, idéologique, sociale et religieuse. Il y a pouvoir dès qu’il est question d’une relation d’hégémonie ou d’influence sur les autres. Le discours s’avère être l’un de ses outils les plus performants puisque les mots ne sont plus simplement les leviers de cette influence, mais ceux qui la façonnent et en déterminent l’étendue et le degré de pénétration. Ces mots agissent sur les réalités, en donnent une interprétation qui les altère ; ils nomment des faits que le pouvoir veut pointer, cristalliser et édifier en axiomes en vue d’obtenir une adhésion et un assentiment.
Ce colloque international aspire à être un espace de réflexion académique sur le monde arabe mais aussi sur d’autres aires culturelles : l’Europe, le monde anglophone, le Moyen-Orient et l’Extrême-Orient et ce, afin d’analyser les mécanismes « universels » propres aux stratégies de communication des diverses institutions du pouvoir, telles que l’État, les partis politiques, les instances partisanes, les mouvances religieuses, etc. qui agissent grâce aux sémantismes des mots et des discours cristallisés dans des idéologèmes (E. Cros : 2003), dans l’optique d’agir sur les imaginaires et les consciences.
Les mots du pouvoir ont déjà été examinés à la lumière de la sociologie politique. Ce colloque propose de les aborder selon une approche sociolinguistique interdisciplinaire : analyse du discours et psychologie sociale, en portant attention à l’effet du discours idéologique dans la construction et la reconstruction de la représentation sociale (B. Py : 2004). Pour ce faire, nous proposons de répartir les questionnements sur trois axes :
1. Création : Pourquoi et comment le pouvoir créé-t-il des mots / expressions qui deviennent des marqueurs d’hégémonie ? Quels sont les procédés lexicaux, terminologiques et stylistiques des néologismes ? Quelles sont les instances qui se chargent de cette création ? Selon quelles modalités ?
2. Manipulation : Quelles sont les opérations langagières exercées sur les mots (extension du sens, restriction, exhumation, nécrologie, désuétude, transfert sémantique…) ? Quels sont les acteurs qui exercent cette manipulation ? Quelles sont leurs stratégies pour parvenir à leurs fins ?
3. Réception : Quel est l’impact de ces mots du pouvoir ? Quel est le processus de leur interprétation, diffusion et circulation auprès des publics concernés ? Quelle vie les mots auront-ils une fois repris par les destinataires ? Quels en sont les effets perlocutoires et illocutoires (Austin : 1964) escomptés ? Quelles sont les actions entreprises par les destinataires face à ces mots (assentiment, consentement, indifférence, résistance, etc.) ?
Indications méthodologiques :
Ce colloque se place dans une perspective interdisciplinaire. Les mots du pouvoir sont à traiter à la lumière de grilles analytiques élaborées au sein des disciplines linguistiques, sociologiques et anthropologiques. Toutes les aires culturelles de l’Europe, du monde anglophone, du Moyen-Orient et de l’Extrême-Orient pourront être étudiées. Divers corpus (discours politiques, manifestes partisans, slogans, doctrines, références idéologiques…) peuvent-être analysés.
Les recherches sur les mots du pouvoir consistent à examiner l’expression des rapports de force dans la langue et la manière dont le lexique rend compte de cette dialectique de l’idéologie et du pouvoir, surtout au regard des événements politiques et sociaux qui secouent le monde depuis 2011. Les analyses prendront en considération le lien entre le discours et son contexte (F. Rastier : 2018). Dans cette perspective, le discours politique, sera abordé dans sa relation au contexte d’énonciation et aux énoncés produits (J.M. Adam : 2011)
Cette approche contextuelle sera la plus à même de rendre compte de la complexité des mots du pouvoir aussi bien du point de vue linguistique qu’énonciatif et rhétorique. Cela englobe notamment l’étude de la relation entre langue et imaginaire, langue et représentation, mais aussi les différents niveaux de production langagière en relation avec l’autorité.
On pourrait également faire appel, pour certains types de textes, à la stylistique dans sa version « sémiostylistique » telle que théorisée par Georges Molinié. Celle-ci permet de rendre compte de la diversité des « signes » que l’on peut trouver dans les discours politiques et, de plus en plus, dans les productions écrites diffusées quotidiennement sur les réseaux sociaux.
Enfin, la prise en compte de « l’extérieur » du texte politique conduit naturellement à adopter une approche critique du discours telle que conçue par les théoriciens américains de la « Critical Discourse Analysis » (CDA), c’est-à-dire étudiant prioritairement le lien entre langage et idéologie à partir d’une analyse approfondie des mots du pouvoir et des relations sémantiques exprimant la domination ou la soumission.
Modalités de soumission :
Les propositions de communication peuvent être rédigées en français, en anglais ou en arabe et envoyées conjointement aux adresses suivantes :
Nous vous prions de respecter les normes suivantes :
- Un résumé (500 mots maximum)
- Nom et prénom, affiliation(s) académique(s) de l’auteur
- Un court CV (1 page)
- Titre de la communication, mots-clés (5 maximum) et bibliographie sommaire
Calendrier :
- Date limite de soumission des propositions : 15 juin 2023
- Notification aux auteurs : 30 juin 2023
- Date du colloque : 23-24 novembre 2023
- Soumission d’articles : 30 avril 2024
- Lieu : Université Paul-Valéry Montpellier 3
Comité d’organisation :
- Nejmeddine KHALFALLAH (Université de Lorraine, France)
- Rima LABBAN (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
Comité scientifique :
- Nancy BALARD (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
- Mariarosaria GIANNINOTO (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
- Fadi JABER (Université de Lorraine, France)
- Faisal KENANAH (Université de Caen, France)
- Nejmeddine KHALFALLAH (Université de Lorraine, France)
- Rima LABBAN (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
- Abdenbi LACHKAR, (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
- Hervé LIEUTARD (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
- Fouad MLIH (Université de Lorraine, France)
- Pascale PELLERIN (CNRS, IHRIM, France)
- Sophie SARRAZIN (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)
- Madeleine VOGA (Université Paul-Valéry Montpellier 3, France)