Dans Comment parler de la société (2009), Howard Becker plaidait que de nombreux supports, produits par des sociologues ou non, permettaient de rendre compte d’aspects divers de la société, mais sans envisager les bandes dessinées et autres comics. Or, depuis quelques années, les BD dites « du réel » (ou de « non-fiction », catégorie forgée par l’entreprise GFK) pullulent. Ce vaste sous-champ éditorial est pour le moins hétérogène : il comprend tant des BD dites de reportage (enquêtes journalistiques1 ou non2), des BD autobiographiques ou relatant une expérience personnelle3 que des BD coproduites par des chercheurs ou chercheuses spécialistes de disciplines très diverses (des sciences dites « dures »4, mais aussi les sciences humaines et sociales5). De plus en plus de BD sont ainsi, directement ou non, scénarisées par des auteurs qui n’avaient traditionnellement pas vocation à investir ce support, parmi lesquels des journalistes – qui interrogent volontiers des chercheurs6 – mais aussi des chercheurs en sciences sociales (sociologues, historiens, économistes ou politistes notamment7 : Moretti, 2023). En France, cette dynamique est croissante au cours des années 2010.
Parmi elles, beaucoup peuvent faire office de BD militantes ou, du moins, à portée politique. Le monde sans fin a ainsi suscité une polémique, où était rappelé le rôle de consultant voire de lobbyiste pronucléaire de Jean-Marc Jancovici8. D’autres BD « du réel » affichent des prises de position politiques revendiquées qu’elles soient féministes, écologistes ou encore antifascistes, tandis que les éditeurs et éditrices (ou directeurs et directrices de collections) assument une volonté de prendre part aux débats de société au moyen de BD favorisant la réflexion. Les BD peuvent ainsi être investies comme supports de politisation (Déloye et Haegel, 2019), tant par leurs auteurs et autrices que par des militants ou organisations mobilisant un album pour défendre leur cause (Alam et Bué, 2024). D’autres, décrivant des institutions, des comportements ou des acteurs politiques, participent aussi de la diffusion de représentations, plus ou moins positives ou négatives, de l’activité politique et de ses acteurs. Ce faisant, à l’instar d’autres produits culturels tels que, jadis, « Les Guignols de l’info » (Collovald et Neveu, 1996), elles peuvent contribuer à la légitimation, la délégitimation, voire la ludification de la politique.
- 9 Par cette expression, nous désignons les albums de BD qui reposent sur des recherches, qu’elles aie (…)
- 10 Les comics studies se sont ainsi développées à partir des années 2000, à la suite d’Inks, la premiè (…)
- 11 B. Beaty, Fredric Wertham and the Critique of Mass Culture, Jackson, University Press of Mississipp (…)
Ce développement de la BD dite « du réel » et, en son sein, des BD d’enquête9, est à replacer dans l’expansion du marché de la BD et dans la légitimation culturelle de ce que l’on qualifie désormais de « 9e art » (Boltanski, 1975 ; Lesage, 2018 et 2019a). Cette dynamique de légitimation de la BD est aussi académique, ce dont témoignent les écrits universitaires de plus en plus nombreux consacrés à la BD, la chaire au Collège de France obtenue pour l’année 2022-2023 par Benoît Peeters, scénariste, biographe d’Hergé et auteur de plusieurs essais sur la BD, ou les encouragements multiples par les institutions de cadrage de la recherche. Le champ des comics studies, en pleine effervescence, peut désormais s’épanouir dans des revues à comités de lecture et des collections chez des éditeurs universitaires de premier plan10. En somme, la BD n’est plus cantonnée à la littérature enfantine ou adolescente ni associée à la « perversion juvénile », selon un argument dominant dans les années 195011, mais participe désormais pleinement de la « transmission des savoirs » (Vandermeulen, 2017), qu’ils soient académiquement produits ou non, voire de la prise de positions politiques.
Pour autant, peu de choses sont connues sur les apports de ces BD, à l’écriture de la recherche académique ou journalistique et à la diffusion des savoirs d’une part, à la diffusion de représentations politiques d’autre part. Dans la revue Mots. Les langages du politique par exemple, il n’y a à notre connaissance qu’un article spécifiquement consacré à la bande dessinée (Ségas, 2012), même si les articles ou numéros portant sur des fictions ou les usages de dessins et autres iconographies sont légion. En dehors, et si on laisse de côté les BD d’histoire dont la tradition est plus ancienne (Lesage, 2019b), l’essentiel des écrits portant sur les bandes dessinées « du réel » sont soit le fait de bédéistes, soit de chercheurs et chercheuses ayant eux-mêmes participé à la production de bandes dessinées. Parallèlement, l’essentiel des rares écrits sur les BD d’enquête (qu’elles émanent de chercheurs ou de journalistes) est le fait de personnes ayant été directement impliquées dans la production de ces BD. Marquées par une tendance à défendre ces initiatives de la part de celles et ceux qui les ont menées, ces riches analyses soulignent nombre des contraintes, avantages et choix d’écriture induits par l’écriture dessinée des sciences sociales ou du journalisme. Elles délaissent cependant plusieurs dimensions importantes, à commencer par les motivations et motifs des maisons d’édition, BDistes et chercheurs et chercheuses qui se lancent dans cette entreprise et par la réception de ces BD, véritable impensé de ces travaux (la mise en BD est prise comme une médiation évidente, une fin en soi qui attirerait « naturellement » un lectorat élargi).
Aussi l’objectif de ce numéro est-il de prolonger ces réflexions pionnières sur l’écriture dessinée du réel, la diffusion de représentations politiques qui lui est inhérente, la publication d’enquêtes sous forme de BD ou la traduction des SHS en BD, mais aussi d’élargir la perspective abordée en investiguant les dimensions encore inconnues de cette dynamique de bédéification des enquêtes. Pour ce faire, ce numéro accueillera à la fois des retours analytiques de chercheurs et chercheuses ayant participé à la production de BD d’enquête12, des lectures détaillées d’œuvres focalisant leur attention sur le langage de la BD et leur portée politique, des lectures comparant les travaux de recherche originaux et leur traduction en BD, ou encore des recherches originales et plus distanciées traitant de l’un ou l’autre des aspects évoqués précédemment.
Les propositions d’article devront donc s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants :
Les conditions de possibilité du développement du genre « BD du réel »
Comme toute production artistique, la BD « du réel » associe une diversité d’acteurs (chercheurs et chercheuses, éditeurs et éditrices, dessinateurs et dessinatrices, scénaristes le cas échéant, etc.) qui constituent un « monde » – au sens de Becker (1988) – dont les intérêts peuvent diverger. Créer une BD du réel suppose qu’en dépit des intérêts divergents, un intérêt commun à la production d’une telle œuvre existe d’une part, qu’un accord sur le produit entre les différents acteurs impliqués soit trouvé d’autre part. Cela suppose aussi que des conventions communes (Becker, 1988) soient rendues possibles, en dépit du fait que les acteurs impliqués appartiennent à différents champs sociaux (recherche, journalisme, bande dessinée, édition, etc.), dont les enjeux, normes, conditions de travail et autres pratiques diffèrent fortement. Comprendre le développement de la BD du réel suppose donc moins de dresser une chronologie des étapes ayant mené à l’émergence de ce genre éditorial (avec les effets de naturalisation propres à cette forme de rationalisation qu’est la chronologie) que de rendre compte des raisons d’agir des différentes catégories d’acteurs (Alam et Bué, 2024), mais aussi des contraintes qui se posent à elles, des modalités de leur rencontre, des conciliations opérées entre les registres de légitimité propres à chacun des champs concernés, etc.
Interroger le développement de ce genre éditorial qu’est la BD du réel suppose aussi de questionner la catégorie elle-même : comment cette catégorie est-elle apparue ? De quelle réalité parle-t-on alors ? De réalisme ou de réalité ? Quelle part la fiction peut-elle y tenir ? Comment fiction et réalité y cohabitent-elles ?
Les langages (politiques) de la BD du réel
Le langage de la BD du réel constitue un second axe. L’acte d’écriture, sous forme de BD ou non, participe pleinement de la production de l’enquête dans la mesure où, comme l’a montré Jack Goody (1979) la mise en écriture (ou en dessin, ou en BD) structure nos façons de penser. Changer de mode d’écriture pour adopter celui de la BD, c’est en effet changer de conventions d’écriture au profit de celles de la BD (Groensteen, 1999 ; Cohn, 2013 ; Sousanis, 2016) et, ce faisant, sélectionner et ordonner différemment les informations, les livrer sous des formes différentes. C’est finalement toute l’écriture qui peut s’en trouver affectée. Ce second axe vise ainsi à questionner les spécificités du (ou des) langages des BD du réel, notamment dans leurs dimensions politiques, en questionnant plus particulièrement ce que la présence du dessin et de son intelligence sémiotique, d’une part (Robert, 2018), et les caractéristiques du médium BD, art séquentiel de l’ellipse (Mc Cloud, 1993), d’autre part, autorisent dans la restitution d’enquêtes et la représentation de la politique. Quelle créativité permet ce type de production si l’on veut prendre au sérieux ce que l’acte d’écriture – écriture dessinée ici – fait à la production du savoir (Nocérino, 2016) ? On pense en particulier à ce qu’écrivent Kuttner, Weaver-Hightower et Sousanis (2020) concernant le champ des usages possibles offerts par la BD (multimodalité, mise en scène de relations spatialisées, de mouvements, d’émotions telles que le bruit ou le son, etc.). Dans quelle mesure la présence de l’enquêteur permet-elle d’introduire la dimension située de l’ethnographie, à la manière d’un Joe Sacco qui, non seulement livre les résultats de son enquête, mais indique aussi son accès au terrain, ses doutes, ses craintes, ses émotions, ses biais et maladresses ? À l’inverse, dans quelle mesure les contraintes inhérentes à la BD peuvent-elles constituer des obstacles à la restitution de certains aspects de l’enquête ?
Réceptions et usages de la BD du réel
Le dernier axe couvre les différentes réceptions, en particulier politiques, des BD du réel, tant dans le monde de la BD (bédéistes, maisons d’édition, presse spécialisée ou non, etc.) que par les divers lectorats. La réception reste en effet un des aspects les plus mal connus de cet essor de la BD du réel. Que sait-on de son lectorat, à la fois sur un plan quantitatif mais aussi qualitatif ? Qui lit ces BD et pour quelles raisons ? Qu’en retirent celles et ceux qui les lisent ? Dans quelle mesure leur réception est-elle « faible » (Passeron, 1991) ou au contraire forte, étant entendu que la bande dessinée est tout autant un medium qu’un langage dont la compréhension, comme l’ont montré Scott McCloud (1993) ou Benoît Peeters (2010), requiert des compétences spécifiques ? Comment les BD d’enquête, notamment celles signées par des chercheurs ou chercheuses, sont-elles reçues dans le monde académique ? De quels usages, politiques notamment, sont-elles, le cas échéant, l’objet ? Comment sont-elles réinvesties par des militants ou la presse engagée, dans des controverses, que ces dernières portent sur les usages du nucléaire (par exemple Le monde sans fin, Le droit du sol, Cent mille ans), le développement des algues vertes en Bretagne (BD éponyme) ou l’action policière (Global police, La force de l’ordre). Finalement, qu’est-ce que ces réceptions plurielles disent de la légitimité de ce type de productions que constituent les BD dites « du réel » ?
Conformément à ligne éditoriale de la revue Mots. Les langages du politique, cet appel est ouvert aux chercheuses et chercheurs de tous horizons disciplinaires, que nous invitons à expliciter leurs présupposés et leurs méthodes, pour faciliter le dialogue entre les différents champs d’étude des langages du politique. Nous encourageons aussi les retours réflexifs de personnes ayant participé à l’écriture de BD d’enquête.
Bibliographie indicative
Alam Thomas et Bué Nicolas, 2024, « Politisation et raisons graphiques des BD de sciences sociales », dans E. Cherrier et S. François dir., Neuvième art, pouvoir et politique, Valenciennes, Presses universitaires de Valenciennes, à paraître.
Becker Howard Saul, 2009, Comment parler de la société. Artistes, écrivains, chercheurs et représentations sociales, Paris, La Découverte.
Becker Howard Saul, 1988, Les mondes de l’art, Paris, Flammarion.
Berthaut Jérôme, Bidet Jennifer et Thurat Mathias, 2021, « Making sociologically-grounded fictions. A review of the sociorama collection experience », Sociologica, vol. 15, no 1, p. 265-290.
Boltanski Luc, 1975, « La constitution du champ de la bande dessinée », Actes de la recherche en sciences sociales, no 1, p. 37-59.
Cohn Neil, 2013, The Visual Language of Comics. Introduction to the Structure and Cognition of Sequential Images, Londres, Bloomsbury.
Collovald Annie et Neveu Erik, 1996, « Les “Guignols” ou la caricature en abime », Mots. Les langages du politique, no 48, p. 87-112.
Déloye Yves et Haegel Florence, 2019, « La politisation : du mot à l’écheveau conceptuel », Politix, no 127, p. 59-83.
Goody Jack, 1979, La raison graphique, Paris, Éditions de Minuit.
Groensteen Thierry, 1999, Système de la bande dessinée, Paris, Presses universitaires de France.
Kuttner Paul J., Weaver-Hightower Marcus B. et Sousanis Nick, 2020, « Comics-based research: The affordances of comics for research across disciplines », Qualitative Research, vol. 21, no 2.
Lesage Sylvain, 2019a, « Une bande dessinée adulte ? Usages et mésusages de la légitimation », Belphégor [en ligne], 17, https://doi.org/10.4000/belphegor.1607 SMASH
Lesage Sylvain, 2019b « Écrire l’histoire en images. Les historiens et la tentation de la bande dessinée », Le Mouvement social, no 269-270, p. 47-65.
Lesage Sylvain, 2018, « La bande dessinée. Entre mainstream et avant-gardes », Savoir/Agir, no 44, p. 47-53.
McCloud Scott, 1993, Understanding Comics. The Invisible Art, New York, HarperCollins Publishers.
Moretti Veronica, 2023, Understanding Comics-Based Research: A Practical Guide for Social Scientists, Londres, Emerald.
Nocérino Pierre, 2016, « Ce que la bande dessinée nous apprend de l’écriture sociologique », Sociologie et sociétés, vol. 48, no 2, p. 169-193.
Passeron Jean Claude, 1991, Le raisonnement sociologique, Paris, Nathan.
Peeters Benoît, 2010, Lire la bande dessinée, Paris, Flammarion.
Robert Pascal, 2018, La Bande dessinée, une intelligence subversive, Villeurbanne, Presses de l’Enssib.
Ségas Sébastien, 2012, « La diplomatie en images. Discours politique et mythe technocratique dans la bande dessinée Quai d’Orsay (tome 1) », Mots. Les langages du politique, no 99, p. 61-78.
Sousanis Nick, 2016, Le déploiement, Arles, Actes Sud.
Vandermeulen David, 2017, « La BD et la transmission du savoir », Le Débat, no 195, p. 199-208.
Modalités de soumission
Les contributeurs et contributrices devront soumettre avant le 30 décembre 2024 un avant-projet (3 000 signes maximum tout compris), dont l’acceptation vaudra encouragement, mais pas engagement de publication.
Les articles, originaux, devront être adressés aux coordinateurs avant la fin du mois de juin 2025 (maximum 45 000 signes tout compris). Conformément aux règles habituelles de la revue, elles seront préalablement examinées par les coordinateurs du dossier, puis soumises à trois évaluations doublement anonymes dans différentes disciplines.
Les réponses aux propositions de contributions seront données à leurs auteurs et autrices au plus tard à la fin du mois de septembre 2025, après délibération du comité éditorial. La version définitive des articles devra être remise aux coordinateurs avant la fin du mois de janvier 2026.
Les textes devront impérativement respecter les règles de présentation habituellement appliquées par la revue (voir https://journals.openedition.org/mots/76). Ils devront être accompagnés d’un résumé de cinq lignes et de cinq mots-clés qui, comme le titre de l’article, devront également être traduits en anglais et en espagnol.
Coordinateurs
- Thomas Alam : thomas.alam@univ-lillle.fr
- Nicolas Bué : nicolas.bue@univ-artois.fr
- Sébastien Ségas : sebastien.segas@univ-rennes2.fr
Notes
1 Par exemple : I. Léraud et P. Van Hove., Algues vertes, l’histoire interdite, Paris, La Revue dessinée/Delcourt, 2019 ; H. Constanty et B. Adès, Une histoire du nationalisme corse, Paris, La Revue dessinée/Dargaud, 2021 ; E. Guéguen, S. Tronchet et E. Terrier, Très chers élus, Paris, La Revue dessinée/Delcourt, 2022.
2 On pense, par exemple, aux BD d’Étienne Davodeau ou de Mathieu Sapin.
3 Voir, entre autres, les BD de Guy Delisle ou de Joe Sacco, Persepolis de Marjane Satrapi, L’arabe du futur de Riad Sattouf, etc.
4 Le best-seller de Blain et Jancovici, Le monde sans fin, en est probablement l’exemple le plus connu. Voir également I. Ekeland et E. Lécroart, Le hasard. Une approche mathématique, Bruxelles, Le Lombard, 2016.
5 Voir la collection « Sociorama », certains volumes de « La Petite Bédéthèque des savoirs », ou encore la récente collection « La Découverte/Delcourt » pour les sciences sociales, la collection « Histoire dessinée de la France » pour l’histoire, etc.
6 B. Collombat et D. Cuvillier, Le choix du chômage, Paris, Futuropolis, 2021.
7 Voir, parmi moult autres, Les meilleurs ennemis de J.-P. Filiu, La force de l’ordre de D. Fassin, F. Debomy et J. Raynal, Global police de F. Jobard et F. Calvez, etc. Certaines enquêtes sociologiques sont directement parues sous formes de BD : L. Mazé et P.Nocerino, « Analyser l’accueil des personnes âgées en institution », ethnographiques.org, no 35, 2017, https://www.ethnographiques.org/2017/Maze_Nocerino (consulté le 12 juillet 2024) ; O. Thomas et P. Génot, Bourdieu, une enquête algérienne, Paris, Steinkis, 2023, etc.
8 Voir par exemple : https://www.stephanehis.com/post/analyse-critique-page-%C3%A0-page-de-la-bande-dessin%C3%A9e-le-monde-sans-fin (consulté le 12 juillet 2024).
9 Par cette expression, nous désignons les albums de BD qui reposent sur des recherches, qu’elles aient été réalisées par des chercheurs (en particulier les chercheurs en SHS : économie, droit, géographie, anthropologie, sociologie, science politique, histoire, sciences de l’éducation, sciences de l’information et de la communication, aménagement et urbanisme, architecture, etc.), des journalistes, des bédéistes, ou autres, et qui restituent des observations ou la parole d’agents sociaux. Une autre tendance tient dans le développement de webtoons ou d’articles scientifiques écrits en BD publiés dans des revues spécialisées.
10 Les comics studies se sont ainsi développées à partir des années 2000, à la suite d’Inks, la première revue spécialisée dans la BD fondée en 1994 par Ohio State University Press. S’ensuivent les revues The International Journal of Comic Art en 1999, ImageText en 2004, The Journal of Graphic Novels and Comics, Journal of Sequential Art in Narrative Education (University of Nebraska Lincoln), Studies in Comics, Comicalités. Étude de culture graphique (toutes trois fondées en 2010), The Comic Grid: Journal of Comics Scholarship (2013), etc., mais aussi des collections d’ouvrages universitaires – « Studies in European Comics and Graphic Novels » (Leuven University Press, 2014), « Routledge Advances in Comics Studies » (Routledge, 2015), « Palgrave Studies in Comics and Graphic Novels » (2016), « Comics Culture » (Rutgers University Press, 2016), « Bloomsbury Comics Studies » (2018), « Studies in Comic and Cartoons » (Ohio State University Press, 2019), etc.
11 B. Beaty, Fredric Wertham and the Critique of Mass Culture, Jackson, University Press of Mississippi, 2005 ; T. Crépin, « Haro sur le gangster ! » La moralisation de la presse enfantine, 1934-1954, Paris, CNRS Éditions, 2001 ; P. Lopes, « Culture and stigma: Popular culture and the case of comic books », Sociological Forum, no 21, 2006, p. 387-414 ; J.-M. Méon, « L’illégitimité de la bande dessinée et son institutionnalisation : le rôle de la loi du 16 juillet 1949 », Hermès, no 54, 2009, p. 45-50 ; P. Ory, « Mickey go home! La désaméricanisation de la bande dessinée (1945-1950) », Vingtième Siècle, no 4, 1984, p. 77-88.
12 Par exemple : Berthaut et al., 2021.