Présentation
L’objet-livre et les pratiques sociales qui l’entourent ne cessent de se réinventer sous l’effet des transformations d’une époque. Il existe certes une littérature déjà conséquente sur le livre numérique, ainsi que sur les transformations des pratiques éditoriales en contexte numérique (Legendre, 2019 ; Tréhondart, 2018 ; Bourassa, Haute, Rouffineau, 2018 ; Saemmer, Tréhondart, 2017 ; Bosser, 2015, 2019 ; Pirolli, 2015) : évolution des pratiques de lecture, secteurs plus ou moins
concernés par les transformations des modalités de publication, formats expérimentaux du livre « enrichi » ou « augmenté », enjeux de conception et de design graphique, pratiques de réception et d’écriture sur le web, sociabilités littéraires en ligne… Pour autant, au vu des enjeux qui soustendent les évolutions actuelles de la filière éditoriale, il nous semble nécessaire de mettre à jour ces analyses, voire de les renouveler.
Ce dossier de MEI souhaite de fait dresser l’état des lieux d’un écosystème du livre marqué, entre autres, par la prolifération de plateformes en ligne jouant un rôle d’intermédiation entre auteurs, éditeurs et lecteurs. Nous souhaitons en questionner les enjeux de communication à une période charnière où le secteur de l’édition doit de plus en plus souvent composer et négocier avec une pluralité d’acteurs qui se sont immiscés et imposés en amont et en aval de la chaîne de production. Entre rétrospective et prospective, il s’agira dès lors d’interroger les jeux de négociation et d’ajustement aboutissant à l’établissement de nouveaux équilibres entre acteurs (lecteur, éditeur, auteur), ainsi que les relations ambiguës et complexes que les acteurs « traditionnels » et nouveaux entrants peuvent entretenir au prisme d’une tendance que certains qualifient de « plateformisation des industries culturelles » (Bullich, Schmitt, 2019).
Des réseaux socio-numériques aux plateformes d’écriture, de vente, de diffusion, d’autoédition littéraire, des géants du numérique aux « starts-up » de l’édition, de nombreux acteurs économiques ont acquis une place non négligeable dans l’écosystème éditorial. Instagram et YouTube sont devenus des lieux de reconfiguration sociale du livre : y émergent de nouvelles formes de médiation, portées par les auteurs, éditeurs, lecteurs, et professionnels de la communication, en lien avec l’édification de normes de visibilité et de reconnaissance en ligne (Siguier, 2020, ;Tréhondart, 2019 ; Chedaleux, 2018). À cet égard, on pourra se demander de quelle manière la crise de la covid-19 et la fermeture des librairies ont impacté le secteur de l’édition (Habrand 2020) : jusqu’où les pratiques des éditeurs, des libraires, des lecteurs et des professionnels de la médiation ont-elle été amenées à se réinventer pour investir de nouveaux espaces d’expression et de communication (festival littéraire en ligne, salons virtuels d’auteurs, création de plateformes de ventes par les librairies indépendantes) ?
Parallèlement, les normes littéraires et les pratiques autour du livre se réinventent, dans le sillage du cadrage industriel opéré par les « architextes » (Jeanneret, Souchier, 1998). Le cadrage des formes et des pratiques créatives de lecture et d’écriture par les normes techniques des plateformes soulève la question des phénomènes de domination mais aussi d’alliance, de négociation, sous le prisme des injonctions à la participation qui caractérisent le capitalisme numérique (Proulx, 2020).
À ce titre, il nous paraît essentiel de questionner le rôle émergent des big data et de l’intelligence artificielle dans le secteur du livre, notamment la manière dont les algorithmes sont mobilisés selon des logiques créatives et économiques (prédiction des attentes des lecteurs, collecte de données, assistants d’écriture…) par les plateformes et les éditeurs eux-mêmes (Audet, Lebrun, 2020 ; Büllich, 2018).
Nous attendons ainsi des contributions utilisant des approches variées pour explorer les phénomènes de reconfiguration et logiques communicationnelles entourant les pratiques actuelles de création, conception, réception, et diffusion du livre en contexte numérique.
Les propositions attendues pourront s’inscrire, de manière non limitative, dans les thématiques suivantes :
– Transformations des pratiques d’édition et d’éditorialisation (régimes de conception du livre numérique, « plateformisation » de l’édition, intelligence artificielle, livre audio, narration automatisée, pratiques de lecture et d’écriture amateurs sur le web) ;
– Postures et figures de l’auteur à l’ère numérique ; 3 – Communication, réception et visibilité du livre sur les réseaux socio-numériques ;
– Évolution des pratiques de lecture, d’édition et de médiation depuis la crise sanitaire.
Calendrier
Les propositions devront être envoyées aux deux coordinatrices du numéro :
Sylvie Bosser, sylvie.bosser[at]univ-paris8.fr ;
Nolwenn Tréhondart, nolwenn.trehondart[at]univ-lorraine.fr.
– 5 avril 2021 : date limite de soumission des résumés ;
Les propositions devront comporter :
- un titre ;
- un résumé d’environ 300 à 500 mots ;
- 5 à 10 mots clefs ;
- les informations sur le ou les auteurs : nom, affiliation institutionnelle, fonction, adresse professionnelle, numéro de téléphone et courriel, petite bio-bibliographie.
– 20 avril 2021 : retour aux auteur.es de la sélection des propositions ;
– 20 juillet 2021 : remise de la proposition intégrale ;
– 20 septembre 2021 : retour aux auteur.es de l’évaluation par le comité de lecture ;
– 30 octobre 2021 : retour de la version 2 revue après évaluation ;
– Jusqu’au 15 décembre 2021 : corrections et relectures ;
– Publication du numéro : début 2022.
Consignes aux auteur.es
Les articles complets sont d’un format de 20 000 à 25 000 signes (espaces, notes et bibliographie incluses).
À partir des évaluations du comité de lecture en double aveugle, la direction du numéro de MEI sélectionnera les propositions et en informera les auteurs au plus tard le 20 septembre 2021. Il est demandé aux auteurs de bien vouloir respecter les consignes éditoriales de la revue.